de la médiation des contraintes et opportunités

Les phénomènes et processus de médiation réfèrent aux interactions qui permettent de composer avec les contraintes et les opportunités liées au contexte du groupe et à celui de ses membres. Par exemple, on peut penser aux interventions nécessitées par l’environnement organisationnel (contacts inter-équipes, échéancier, rapports à produire, moment des rencontres, etc.) et par la situation des membres (contacts externes, expertises, conflits et proximité, réalités familiales, etc.). 

Les processus de médiation conduisent à prendre en considération l’accès aux ressources externes et aux autres groupes, la diversité sociodémographique (âge, éducation, groupe culturel, statut social, etc.), d’expertises et de valeurs des membres qui favorisent ou entravent le travail du groupe.

de la médiation comme raison d’être du groupe de travail

L’attention portée aux phénomènes et processus de médiation vient de pair avec l’idée que la principale raison d’être du travail en groupe est de composer avec les contraintes et les opportunités liées au contexte interne et externe du groupe. Avec cet angle d’approche, le groupe de travail est vu comme un lieu d’intermédiarité où se négocient ces contraintes et opportunités.

On examine particulièrement les liens externes que le groupe et ses membres entretiennent avec l’environnement organisationnel et physique ainsi que les contraintes et opportunités issues de la composition du groupe, notamment sa diversité sociodémographique et d’expertises. On s’attarde également aux contraintes et opportunités offertes par les éléments matériels et technologiques. 

Les impacts positifs des interventions visant à composer avec ces contraintes et opportunités consolident à leur tour la conception du groupe de travail comme lieu de rencontre et de négociation des enjeux externes, internes, matériels et technologiques.

des phénomènes et processus de médiation en contexte naturel

Les phénomènes et processus de médiation sont étudiés surtout à partir de groupes « naturels » (bona fide groups) à l’aide d’études de cas et d’approches de type ethnographique. On examine, par exemple, comment des groupes politiques, des groupes d’enfants, des groupes utilisant des TIC, des gangs de rue, des travailleuses dans des résidences, les membres de coopératives de travail, des conseils de ville, etc., composent avec les contraintes et les opportunités propres à leur contexte et leur membership.

de la médiation des contraintes et opportunités externes

La médiation des contraintes et opportunités externes au groupe s’effectue lors des interactions avec d’autres groupes ou personnes au sein de la même organisation ou d’autres organisations. Il s’agit d’interactions qui permettent au groupe et à ses membres de composer avec les contraintes et les opportunités qui affectent le groupe. Lesquelles peuvent être par exemple liées aux ressources matérielles, technologiques et financières, aux espaces disponibles, aux règles et normes organisationnelles, au temps disponible, etc.

La capacité des groupes à développer des relations d’échange avec l’environnement leur donne accès aux connaissances et aux ressources qui y sont disponibles (expertise présente dans l’organisation, soutien d’autres groupes, ressources matérielles, etc.). L’établissement de telles relations d’échange avec des éléments externes variés donne accès à des informations nouvelles et favorise le transfert de connaissances entre les groupes au sein de l’organisation, ce qui a généralement un impact positif sur l’efficacité et la créativité du groupe. 

des processus de médiation des contraintes et opportunités internes

Les processus de médiation interne prennent place dans les interactions visant à composer avec les contraintes et les opportunités liées aux attributs sociodémographiques des membres, à la variété de leurs besoins, à la diversité de leurs expertises, à leur accès à des ressources, etc. Par exemple, on pense ici à la diversité d’âge, d’éducation, de genre, de profession, de nationalité, de statut social, de valeurs, d’objectifs, d’appartenance, etc. Au-delà des éléments facilement détectables, comme les caractéristiques sociodémographiques, il existe de très nombreuses caractéristiques moins directement visibles telles que les attitudes, les valeurs, les connaissances, les aptitudes, l’expérience reliée à l’emploi ou au sein du groupe, le bagage éducationnel, etc. Les objectifs individuels des membres peuvent ne pas être compatibles avec ceux du groupe. Des membres peuvent être impliqués dans plusieurs groupes de travail, ce qui peut générer des contraintes de rôles et des conflits d’allégeance, mais qui peut recéler aussi des opportunités de contacts et d’accès à des ressources externes. 

des avantages de la diversité

Les principaux avantages de la diversité au sein des groupes de travail proviennent de l’accès et de l’exposition à de multiples sources d’information. L’introduction de ces éléments d’idées et perspectives différentes au sein des échanges conduit à la génération de nouvelles options.

Sur le plan de la tâche, la prise en compte de la diversité permet de meilleures prises de décision et d’éviter le piège de la solution prématurée (pensée groupale). La diversité de formations et d’expertises est notamment favorable dans le contexte de tâches complexes. 

Sur le plan relationnel, la considération positive de la diversité des membres réduit l’apparition de conflits. Par exemple, les groupes qui accueillent régulièrement de nouveaux membres et en voit partir d’autres expérimentent moins de conflits que les groupes où l’effectif est stable et change peu. 

des inconvénients de la diversité

Un important inconvénient de la diversité au sein des groupes de travail est l’augmentation du coût des interactions. La multiplicité des disciplines et cadres de référence explicatifs, des parcours professionnels et personnels, des référents culturels, etc., entrave le développement d’un langage commun, alourdit les échanges et conduit parfois à de l’incompréhension, à des frustrations et à des pertes de temps. Il peut s’installer une dynamique compétitive, où chacun·e cherche à valoriser et à défendre son cadre de référence. Tout cela nuit à l’émergence de normes communes et rend plus ardue la gestion des conflits internes.

Bref, la diversité demande plus de temps, le temps d’atteindre une certaine maturité.

des lignes de faille

Les éléments de diversité donnent lieu à l’apparition de lignes de faille, c’est-à-dire des lignes de divisions potentielles sur la base de caractéristiques partagées par des sous-groupes. Par exemple, les membres spécialistes en ingénierie vs les membres qui utilisent les systèmes, les membres expérimentés vs les néophytes, les jeunes et les moins jeunes, etc. Au fil des interactions, l’identification et le sentiment d’appartenance peuvent devenir plus forts à l’égard du sous-groupe qu’à celui du groupe dans son ensemble. Ce processus réduit la satisfaction des membres à l’égard du groupe et peut donner lieu à l’émergence de conflits relationnels entre les membres des sous-groupes de chaque côté des lignes de faille.

L’apparition des lignes de faille se prévient en augmentant la diversité. À la limite, s’il y a autant de sous-groupes qu’il y a d’individus, il n’y a pas de lignes de faille possible, pas de rassemblement des uns·es contre les autres. 

de la médiation des contraintes et opportunités matérielles et technologiques

La médiation des contraintes et opportunités matérielles et technologiques prennent place dans les interactions avec des éléments tels les moyens de communication, les outils informatiques ou les ressources matérielles.

du groupe de travail comme lieu de médiation avec l’environnement

Les premières études consacrées aux processus de médiation des contraintes et opportunités matérielles et technologiques, conduites au Tavistock Institute of Human Relations de Londres, ont amené une conception sociotechnique des organisations comme des ensembles de systèmes techniques et humains étroitement joints, où les groupes de travail constituent des lieux de médiation entre la tâche et les contraintes environnementales. 

On a alors constaté que l’autonomie des groupes de travail quant aux méthodes à déployer favorise l’adaptation à l’environnement, à la technologie et à la complexité. Sur le plan cognitif, cette autonomie donne un sens au travail du groupe.

de la médiation technologique des réunions 

Les études de la performance de groupes de travail en ligne, conduite avant la pandémie, ont constaté une productivité inférieure ou égale aux réunions en présence. Il a aussi été montré que la maitrise du travail en ligne par les membres améliore la performance des groupes. Aussi, considérant l’accroissement fulgurant du télétravail et des réunions en lignes causé par les confinements liés à la pandémie, on peut faire l’hypothèse que ces premières observations sont appelées à changer.